Elle souhaite d’ailleurs un jour pratiquer la moto sur un circuit. Cette jeune ingénieure de 25 ans est une fonceuse et elle n’a pas hésité à quitter sa région natale pour aller travailler dans le milieu du nucléaire. Originaire de Chambéry, elle aurait pu exercer dans l’hydraulique à quelques pas de chez elle. Mais elle sait ce qu’elle veut. Elle a donc postulé au niveau national chez EDF et pouvait être affectée dans n’importe quelle région à travers la France. C’est finalement à quelques pas de la centrale de Tricastin qu’elle a finalement posé ses valises, dans un logement de fonction. Malgré les astreintes assez fréquentes, elle prend du plaisir à évoluer dans ce métier où elle a obtenu des responsabilités dès son arrivée. Elle a beaucoup gagné en confiance. 

Son Conseil :

 « Vous souhaitez une mission passionnante, diversifiée, avec une présence terrain, travailler sur un site nucléaire est fait pour vous ! »

 Son cursus universitaire

Son parcours, ses doutes et ses choix

Pendant sa Terminale Scientifique, elle avait de bons résultats Au moment de choisir, elle a longuement hésité avec des études de médecine, avant d’intégrer une classe préparatoire.

La mécanique, un secteur porteur

« C’est la formation et le type d’apprentissage qui a fait la différence au final. Il y a trop de connaissances à assimiler par cœur en médecine, cela ne me convenait pas. J’aime être dans la réflexion et développer mon esprit logique. » Ses professeurs lui ont conseillé de faire une prépa. « J’aimais particulièrement les mathématiques et la physique. J’ai donc fait le choix de la mécanique, le domaine qui me paraissait le plus large avec le plus de débouchés. Je savais que je trouverai du travail. ».

A l’issue des deux ans de prépa, elle a tenté différents concours et a obtenu entre autres Polytech Lyon qu’elle a choisi de rejoindre. « Techniquement, la formation amène à plusieurs métiers et permet de poursuivre dans différents secteurs. Je n’utilise pas toutes les connaissances dans mon travail actuel mais cette vision globale de la mécanique est essentielle et permet d’aller chercher des solutions ailleurs et de résoudre ainsi un certain nombre de problèmes. »

Une fois l’école intégrée, elle a effectué différents stages. « Ces expériences sont essentielles pour être sûr de ce qui nous plait ou au contraire, ne nous convient pas. » Mais, selon elle, il ne suffit pas de faire des stages, il est important de bien les choisir et non par défaut afin de découvrir les différents secteurs d’activité. « Puis une fois dans l’entreprise, il faut être curieux, ne surtout pas être passif et accepter les challenges qu’on nous demande de relever. » 

La mixité durant ses études

En école d’ingénieur à Polytech, elle a passé trois ans en mécanique dans une promotion composée presque exclusivement de garçons.

Une mixité quasi inexistante

Les filles représentent entre 8% en 3e année et 15% en 5e année des effectifs. Cependant, Anaïs s’entend aussi bien avec les filles qu’avec les garçons donc cette quasi absence de mixité ne l’a pas dérangée. Certaines filières de Polytech sont nettement plus mixtes notamment en génie biomédical, en maths appliquées et modules, et en matériaux.

Des stages déterminants

Elle a tout d’abord réalisé deux stages, à AREVA puis à NTN-SNR, une entreprise spécialisée dans les techniques de roulement pour l’industrie, l’aéronautique et l’automobile. Ce dernier, en production automobile a été le déclic, elle a su qu’elle voulait faire un travail de terrain et qu’elle ne voulait pas exercer dans un bureau d’études.

Une opportunité à EDF

Elle a ensuite suivi son stage de fin d’année dans une la centrale nucléaire de Cattenom en Lorraine, stage qu’elle avait obtenu en se rendant aux Energy Days (forum professionnel) à Paris organisés par EDF où tous les secteurs étaient représentés : thermique à flamme (charbon ou autre combustible), énergies renouvelables ou encore conception. « C’était super, j’ai pu rencontrer des personnes travaillant chez EDF, des jeunes comme des plus anciens. »

Ce stage a été une vraie révélation et a beaucoup compté dans son parcours futur : « Alors que je ne connaissais pas grand chose sur le nucléaire, je devais améliorer le fonctionnement du service mécanique. » A la fin des six mois, il n’y avait alors pas de ticket d’embauche mais son tuteur l’a chaudement recommandée lorsqu’elle a postulé au niveau national à EDF.

A l’issue d’un certain nombre d’entretiens, elle a été embauchée et pouvait alors être affectée dans n’importe quelle région de la France.

 

Le nucléaire, un univers à part

Afin de travailler dans le nucléaire, il faut accepter un certain nombre de conditions propres au nucléaire.

Des contraintes et des responsabilités

En effet, il faut tout d’abord accepter de ne pas vivre à proximité des commerces et du centre-ville. Sa mission comportant une astreinte technique, elle a l’obligation d’habiter dans une commune proche de la centrale : « J’ai fait le choix d’habiter dans une maison de fonction. C’est assez particulier, tous les salariés habitent les uns à côté des autres. C’est très basé autour de la communauté. C’est tout un état d’esprit, mais cela fait aussi partie de la culture de l’entreprise. »

Les astreintes sont relativement fréquentes, une semaine chaque mois, week-end compris : « Je ne peux pas aller voir des amis le soir. Je dois rester à mon domicile pour être joignable sur son téléphone filaire à tout moment. »

En dehors de cela, dès son entrée à EDF, elle a pu compléter sa formation d’ingénieure par une formation obligatoire de 3 mois sur la spécificité du nucléaire alors qu’elle était encore jeune et peu expérimentée, on lui a tout de suite laissé sa chance et confié des responsabilités. « Je coordonne une équipe lors des arrêts de tranche. »

Elle a également d’importantes responsabilités techniques et doit prendre elle-même des décisions en cas d’aléas et s’assure qu’elles soient appliquées. « Quand il y a des activités particulièrement sensibles de décontamination, je pilote les opérations. C’est très gratifiant mais il faut aussi être réactive, rigoureuse. »

Son métier d’appui technique de la branche logistique

Sa vision

Les aspects les plus plaisants du métier :

  • travailler en projets avec des équipes
  • le côté opérationnel et concret du terrain : même lorsqu’elle n’est pas sur le terrain, elle pilote des activités qui se déroulent en temps réel
  • un poste très formateur, elle apprend tous les jours
  • le fait qu’on lui confie des responsabilités malgré son jeune âge et de sentir que sa présence est utile, voire parfois indispensable
  • les relations et échanges directs avec les prestataires financiers et contractuels : c’est elle qui fixe les priorités de la journée le matin même.

Les aspects plus contraignants :

  • les nombreuses règles et procédures très strictes à suivre : la lourdeur administrative liée au domaine du nucléaire
  • lors des arrêts de tranche, il y a une grosse charge de travail, avec des réunions y compris les week-ends
  • les astreintes toutes les 6 semaines pendant une semaine.

Zoom sur ses missions

A noter que la vie de la centrale est rythmée par les arrêts de tranche, autrement dit les arrêts périodiques de la production des réacteurs nucléaires. Une fois par an, chacun des quatre réacteurs est arrêté pour effectuer toutes les vérifications nécessaires et recharger la cuve. « L’objectif étant d’assurer la sureté des installations. » 

Préparation d’un arrêt de tranche

Ce travail de préparation en amont est essentiel et s’étend sur une période de 4 mois.

Gestion / Logistique en amont

Dans un premier temps, elle identifie les activités à réaliser, les prépare et les planifie. S’il y a besoin par exemple de pièces de rechange ou d’échafaudages, elle passe les commandes afin que tout soit prêt le moment venu. Elle organise les ressources prestataires et échelonne les opérations. « C’est une grosse part de logistique mais c’est varié et l’équipe est soudée. Nous travaillons ensemble pendant plusieurs mois autour d’un projet. »

Pilotage de la logistique sur les arrêts de tranche (1 réacteur = 1 tranche)

Une fois par an, lorsque le réacteur est arrêté pour maintenance, Anaïs est correspondante logistique et donc la représentante de son service sur le projet.

Un rôle de supervision

Elle a pour objectif de tenir les délais tout en garantissant la sûreté de la tranche. Chaque matin, elle arrive à 7 heures et fait le point avec les équipes de nuit. Puis, vient le temps de réunion avec les équipes projet et les chargés d’affaires. Elle fixe les priorités de la journée dans sa spécialité. Une fois sur le terrain, elle s’assure du bon déroulement des opérations. En début d’après-midi, c’est l’heure d’un nouveau point sur ce qui a été fait le matin et de discuter des éventuels points de blocage. Un dernier point a lieu le soir pour donner les priorités du lendemain.

Sur le terrain, elle s’assure du bon déroulement des opérations : « Les chargé.e.s d’affaires pilotent eux-mêmes leur domaine d’activité dans leur intégralité. Je veille simplement à ce que les personnes qui travaillent avec moi aient bien compris les objectifs de la journée. Je vérifie qu’ils ont été réalisés. » 

Durant ce temps d’arrêt d’une durée variable, il faut changer le combustible. « On en profite pour visiter les circuits, les moteurs, les pompes, tout ce qui constitue l’installation et s’assurer de leur bon fonctionnement. On fait beaucoup de maintenance préventive. Il faut être très rigoureux, l’erreur est proscrite. » Elle gère également les éventuels aléas. Enfin, elle doit bien entendu faire attention à ce que le planning soit bien respecté afin de pouvoir réaliser toutes les opérations dans le temps imparti : « C’est de la gestion de projet, la pression est grande mais très stimulante. Chaque jour ou heure d’arrêt en plus entraine des coûts supplémentaires. Les enjeux financiers sont importants. ».

Chef de chargement lors des opérations de manipulation combustible

Elle gère, en binôme, le chargement et le rechargement de la cuve, située au cœur du réacteur, à l’aide d’une machine.

  •  Responsabilités en matière de sûreté
    « On sort l’assemblage, on le déplace, on le récupère et on l’entrepose dans une piscine conçue spécialement pour accueillir ce type de matériel. L’eau est un bon écran de radioprotection. » Beaucoup d’opérations sont automatisées mais ils doivent à eux deux vérifier, à l’aide de caméras, que l’assemblage est positionné au bon.
  • Correspondante environnement
    En dehors des arrêts de tranche, elle est correspondante environnement et représentante donc son service en la matière. Chaque service de la centrale désigne un correspondant chargé de porter les exigences environnement du site dans leurs activités.
  • Participation aux projets environnementaux
    Elle participe donc aux inspections en cas de visite de l’Autorité de Sûreté Nucléaire (ASN). Elle travaille aussi à la création de projets environnementaux.

Participation à la vie du service logistique

Lorsqu’elle n’est pas en arrêt de tranche, elle vient en appui à ses collègues lorsqu’ils sont à leur tour en arrêt de tranche. C’est le cadre pour développer un esprit d’équipe et de cohésion. Chaque réacteur est arrêté une fois par an pour maintenance et rechargement de combustible : les Arrêts de tranches rythment la vie du site. La solidarité entre les équipes est essentielle pour préparer est réaliser ces projets.

Son environnement professionnel

La structure

1 371personnes EDF travaillent sur la centrale et entre 500 et 1000 salariés d’entreprises prestataires.

Des opportunités professionnelles

Pour travailler sur une centrale, il faut être rigoureux. : « Les procédures et les démarches administratives sont nombreuses et parfois pesantes, il faut justifier tout ce que l’on fait. Nous ne sommes qu’un petit chainon pour faire fonctionner tout un système. »

Être dans un groupe offre aussi de belles perspectives d’évolution. Elle est rentrée à EDF en tant qu’ingénieure mais il lui sera possible d’évoluer aussi bien dans sa filière logistique, que vers d’autres spécialités comme la chimie, maintenance, robinetterie, énergies renouvelables ou même le service Ressources humaines. De nombreuses passerelles existent.

Pour multiplier les opportunités et évoluer plus vite, Anaïs a signé une clause de mobilité. Elle peut être mutée prochainement sur un autre site à travers la France entière.

Ses relations professionnelles sur le site

Du fait de sa fonction transversale, elle est en lien avec différents corps de métiers.

Un poste interactif

Elle gère les prestataires lors des arrêts de tranche. Il s’agit principalement de techniciens ou maitrises. Au niveau de ses collègues, elle collabore de façon régulière avec des chargés d’affaires, des cadres pilotage ou encore des ingénieurs tout comme elle. « J’ai trouvé mes marques, tout se passe très bien. »

Mécanique + Nucléaire = peu de femmes

Lors des réunions matinales des arrêts de tranche, elles ne sont que deux femmes pour une trentaine de personnes. Le milieu du nucléaire est déjà très masculin, et ce n’est pas la filière qui attire davantage de femmes.

Être ferme

Évoluer professionnellement avec des hommes ne la dérange pas, elle ne fait pas la différence. « Pour ma part, je ne travaille ni avec des hommes ni avec des femmes mais avec des collègues, des agents et intervenants. De l’autre côté c’était un peu plus compliqué. Il a quand même fallu que je fasse mes preuves, que je sois crédible, plus ferme et présente sur le terrain auprès des équipes que je pilote. J’ai beaucoup gagné en assurance et en maturité.  Pour travailler dans l’industrie, il faut avoir du caractère. ». Désormais, tout se passe très bien et elle sait se faire respecter.

A noter aussi que sur le site, il y a également des services où le personnel féminin est mieux représenté, notamment dans les services tertiaires comme la communication ou la gestion. Cependant, la présence des femmes tend à se développer dans la filière technique à EDF. Notre directrice d’unité est une femme !