Jusqu’en classe de 3e, Marie-Charlotte voulait devenir interprète français-allemand. C’est suite à un échange avec une conseillère d’orientation au cours de sa dernière année de lycée qu’elle a finalement décidé de s’orienter plutôt dans une voie scientifique. Cet entretien de trente minutes l’a finalement convaincue de faire évoluer son projet professionnel. Etant donné qu’elle a toujours été attirée par la physique, elle a donc décidé de rejoindre ce cursus. Très vite, elle a été particulièrement intriguée par l’infiniment petit, comprendre ce qui ne se voit pas à l’œil nu. Aujourd’hui, elle ne regrette pas ce changement de cap et s’investit massivement dans son travail. Le sport représente pour elle une échappatoire afin d’évacuer la pression qui fait partie intégrante de son travail.

Son Conseil

« Pour trouver un premier emploi dans ce domaine ou avoir une évolution de carrière intéressante, il est important d’être mobile. »

Son cursus universitaire

C’est donc en classe de seconde, qu’elle a fait le choix de se diriger vers la recherche, dans le domaine de la physique.

Un choix d’orientation tardif

« Dès le départ, j’étais déjà plus orientée sur la physique du noyau mais je n’ai pas eu pour autant un parcours très rectiligne. »

Rentrée en Prépa Maths sup, elle n’est restée que 15 jours, car cette formation ne lui convenait pas. Elle a donc rejoint un cursus universitaire mais, un peu perdue, elle a redoublé sa première année de licence de Physique.
Elle a suivi ensuite sa licence et son Master 1 en décalé : « J’ai eu des problèmes de dos qui ont perturbé mon cursus et m’ont laissé avec un semestre sans cours pendant mon Master 1. J’en ai donc profité pour ajouter un stage afin de découvrir le milieu des laboratoires et acquérir une première expérience très intéressante. »
Ce stage volontaire en Master 1, dans le milieu de la recherche, où elle a eu l’occasion de faire de la manipulation sur des faisceaux de particules, a été une révélation. Elle a immédiatement accroché et su qu’elle voulait poursuivre dans cette voie afin d’intégrer le Master 2 Recherche en Physique Subatomique et Astrophysique. « Ce stage a eu l’effet d’un déclic sur moi pour la suite de mon parcours universitaire. C’est à partir de ce moment-là que j’ai compris à quoi me servait cette théorie qui m’apparaissait comme abstraite et que je me suis plus investie dans mes études. »
Pour obtenir une allocation de recherche et pouvoir effectuer sa thèse, elle savait qu’il fallait obtenir de bons résultats et être bien classée. « Cela a été source de motivation. J’ai fait preuve de persévérance cette année-là. » 

La mixité durant ses études

Au fil des années de licence de physique, la part de mixité est devenue de moins en moins importante. C’est seulement une fois en Doctorat qu’elle a de nouveau grimpé.

Vers plus de mixité en doctorat

Durant les trois années de licence, les filles représentaient un peu plus de 30%. Puis, dans son Master Physique Subatomique et Astrophysique , elles constituaient à peine 20% des effectifs. « J’avais choisi cette voie en ayant conscience de cette réalité. Donc cela ne m’a pas posé de problème. ». Cependant, selon le choix de la spécialité, cette proportion varie. En Master 2 Physique – Environnement, Atmosphère et Radioprotection, les filles sont presque aussi nombreuses que les garçons (47%). 

De la thèse à son emploi actuel

Après sa thèse, elle a finalement fait le choix de rejoindre le monde de l’entreprise.

De la recherche à la conception

Elle avait fait son stage de Master 2 à l’Institut de physique nucléaire de Lyon, qui est rattaché à l’Université Lyon 1. Sa thèse s’inscrit dans cette continuité, puisqu’elle portait sur le domaine de la physique médicale et plus particulièrement de l’hadron thérapie (contrairement à la radiothérapie, il s’agit de particules lourdes).
Pendant une longue partie de sa thèse, elle imaginait ensuite poursuivre dans la recherche. Mais pour des raisons personnelles, elle souhaitait aussi rester sur Lyon. « Au moment de finir ma thèse, j’étais sur liste d’attente pour un poste d’attachée temporaire d’enseignement et recherche. » Mais finalement elle n’était pas intéressée, le salaire étant trop bas à ses yeux et ayant obtenu un contrat en interim chez AREVA.
Quelques mois avant la fin de sa thèse, presque par hasard, elle s’était rendue à une présentation donnée à des étudiants de l’ISTIL (aujourd’hui appelé Polytech Lyon) par le directeur scientifique d’Areva : « Même si cela me paraissait un peu loin étant donné que je passais alors de la physique médicale dans la recherche publique à l’énergie au sein d’une entreprise, j’ai eu comme un déclic. »
Cette conférence l’a boostée pour la suite. L’idée a fait son chemin. Sa candidature par internet n‘avait pas abouti. C’est finalement par le biais d’une annonce intérim qu’elle a pu intégrer Areva Lyon. Il ne s’agissait alors plus d’hadron thérapie mais de radioprotection. A l’issue de son contrat de six mois, un poste s’est ouvert. Même si elle reconnaît volontiers avoir eu une vraie part de chance, elle l’a provoquée et s’est donné les moyens de parvenir à ses objectifs.

Un métier passionnant et exigeant

Dans son métier actuel, être mobile est un vrai atout pour saisir les opportunités de carrière et évoluer plus vite.

La mobilité, un atout

La mobilité est fortement encouragée, à travers la France tout comme à l’étranger : « Pour ma part, je n’ai pas bougé de Lyon, je suis un contre-exemple. » En dehors des quelques déplacements (une fois par mois environ) pour aller voir des client.e.s ou des équipes d’AREVA sur un autre site du groupe, elle assiste de temps en temps à des conférences sur les outils de calcul essentiellement et sur la radioprotection.
Ce qui ne l’empêche pas d’avoir des responsabilités de pilotage d’un lot d’études et d’encadrement des stagiaires.
Selon les périodes, son métier lui demande un certain degré d’investissement : « Nous avons des objectifs de rentabilité, il y a donc forcément de la pression, pour garantir également un haut degré de qualité dans nos études liées à la sûreté. L’ingénierie c’est à la fois intéressant et exigeant. »

Son projet professionnel

Pour le moment, elle aimerait évoluer en interne au sein du groupe Areva. Elle pourrait se diriger vers un poste plus transversal avec une dimension projet plus forte. Les possibilités sont nombreuses. Dans tous les cas, ses bases techniques seront un atout.
Le site est divisé en sections et en départements pilotés par des managers et manageuses qui sont des ingénieur.e.s de formation. Elle pourrait aussi être chargée d’affaires et donc vendre les études ou choisir la voie technique de l’expertise et devenir une spécialiste dans un domaine, une sorte de référente. 

Son métier d’ingénieure d’études dans le nucléaire

Sa vision

Les aspects les plus plaisants du métier : Travailler sur des projets industriels d’envergure nécessitant plusieurs années de conception– l’ouverture sur beaucoup d’autres domaines et le contact avec d’autres corps de métiers et domaines de compétences (physique, mécanique, génie civil, chimie…) – essayer de comprendre le fonctionnement d’un réacteur dans son globalité, voir comment les options se dessinent : elle apprend au quotidien de nouvelles choses – faire partie d’une équipe : les échanges sont nombreux et fréquents – la liberté accordée une fois la confiance gagnée.

Les aspects plus négatifs : une certaine pression : elle doit vendre des études, piloter et/ ou réaliser des études techniques complexes dans les temps – un processus parfois lourd et contraignant et une organisation qui manque de souplesse. 

Zoom sur ses missions

Marie-Charlotte travaille dans le département lié au procédé et à la sureté.

Études d’ingénierie 

Sa mission consiste principalement à trouver les meilleures dispositions contre les radiations pour le personnel qui est amené à entrer dans les différents locaux du bâtiment du réacteur et à vérifier leur bon fonctionnement.

La réalisation de calculs

Pour ce faire, elle commence par modéliser le réacteur en 3D à l’aide de logiciels informatiques très performants afin de connaître la dose de radio activité contenue dans le local : « Mon rôle consiste à activer les bons paramètres et les bons processus. La technologie se charge ensuite des calculs très complexes. »
A partir de cela, elle calcule, toujours à l’aide de logiciels très sophistiqués, l’épaisseur de la protection biologique (en béton par exemple) nécessaire pour pouvoir pénétrer en toute sécurité dans le local en question, en prenant en compte les nombreuses contraintes d’efficacité de radio protection, de coût mais aussi de faisabilité puisque les matériaux sont plus ou moins faciles à manipuler dans le réacteur.
Elle rédige ensuite l’étude avec ses résultats dans un souci de traçabilité des paramètres utilisés et des calculs réalisés. Les processus standardisés d’assurance qualité à respecter sont très rigoureux.
Sa responsabilité est grande puisqu’elle touche à la sécurité de personnes même si ces études de radioprotection font bien entendu l’objet de contrôles et d’autres mesures avant d’être appliquées. 

Responsabilités techniques et de management

« Quand on est ingénieure d’études, on peut s’orienter dans plusieurs directions. Pour ma part, il s’agit de la voie « projet ». 

Vers plus de responsabilités

« J’ai assuré le pilotage technique et je coordonne le travail des cinq ingénieur.e.s en charge de réaliser les études nécessaires. » Elle fait aussi l’interface avec le client.
Au fur et à mesure, elle gagne en responsabilités et elle est de plus en plus en contact direct avec les clients. Cette dimension relationnelle lui plait beaucoup. « Si on le souhaite, on peut se cantonner uniquement à ce qu’on nous demande, mais cela risque d’être vite ennuyeux et ne contribuera pas à avoir des opportunités d’évolution. Il faut à tout prix se démarquer. Notre parcours, c’est nous qui le faisons. On peut rester dans son coin ou échanger avec des personnes de différents métiers sur des projets très intéressants. » 

Relationnel

Le travail en équipe est indispensable pour continuer d’évoluer dans son domaine de compétences.

Des échanges quotidiens

« On partage nos connaissances et on avance ensemble. On peut compter les uns sur les autres pour s’épauler, se conseiller ou tout simplement échanger. » Les temps de réunions sont fréquents : partage d’informations générales (réunions de section) ou plus spécifiquement sur certains aspects techniques. En dehors de cela, les échanges se font au quotidien de façon informelle et naturelle. 

Offre technique 

En tant qu’ingénieure, elle conserve et partage les informations techniques du projet.

Gestion du client

C’est donc à elle qu’incombe la responsabilité de gérer son client et de formuler des propositions d’études. On ne peut pas parler de démarchage commercial à proprement parler. De par son conseil et son expertise, elle doit ‘inciter’ autant que possible le client à commander d’autres études en matière de sûreté et prouver l’intérêt qu’il a à les réaliser. « Il faut donc maitriser l’ensemble des aspects du son projet et être force de propositions afin que le client renouvelle sa confiance à l’entreprise. C’est à chaque fois un nouveau défi à relever. » 

Son environnement professionnel

La structure

Areva Lyon est un immense centre d’ingénierie qui compte plus de 1300 personnes.

Une organisation très hiérarchisée

« Ce que j’aime dans cette organisation, c’est le travail en équipe. Il y a toujours des ressources humaines à notre disposition, une personne sur qui s’appuyer pour des questions techniques. » En ingénierie, elle a la possibilité d’échanger facilement avec d’autres collègues.
Le fait de travailler pour une structure de taille aussi conséquente permet d’avoir des missions très diverses et de travailler sur des études assez fines, poussées et donc particulièrement intéressantes. Les opportunités d’évoluer vers d’autres métiers du nucléaire sont également multiples. « On a aussi beaucoup d’autres avantages comme une mutuelle, un comité d’entreprise très actif et normalement une certaine pérennité de l’emploi. »
En contrepartie, cette grande organisation est bien structurée, en strates. Chaque étape est donc très contrôlée ce qui engendre des lourdeurs dans les processus de validation.

Ses relations professionnelles

Réservée de nature, en six ans d’expérience, elle a beaucoup gagné en confiance en elle.

Prouver ses compétences

« J’avais tendance à m’effacer au profit du groupe. Aujourd’hui, je n’ai plus peur de dire ce que je pense et de m’imposer. »
Selon elle, la plupart des jeunes ingénieur.e.s qui sortent de l’université ont tendance à se sentir complexés par rapport à ceux issus d’écoles d’ingénieurs alors qu’il n’y a pas lieu de l’être. « Il ne faut pas se sous estimer, on est tout aussi légitimes. Les mentalités ont aussi beaucoup évolué. A partir du moment où l’on est embauché, chacun doit faire ses preuves, démontrer ses aptitudes et compétences. »
Du fait de son métier, elle est en contacts fréquents avec ses client.e.s, ses collègues physiciens et d’autres ingénieur.e.s de divers corps de métiers comme la chimie et la mécanique. 

Un univers plutôt masculin

En énergie nucléaire, les femmes sont globalement en minorité même si selon les corps de métiers, elles sont plus ou moins bien représentées.

Une mixité contrastée

Les femmes constituent un peu plus de 30 % des ingénieurs d’Areva Lyon. Mais la proportion est très variable selon les secteurs concernés. Le département Mécanique ne compte pas une seule femme. Alors que dans sa section Neutronique / Criticité et Radioprotection, les femmes sont en supériorité numérique par rapport aux hommes.
« J’ai la chance de travailler au sein d’une équipe mixte. Mes relations avec mes collègues hommes se passent très bien. Il faut dire que je n’occupe pas un poste où je dois gérer une équipe de techniciens sur le site donc je ne rencontre pas de difficulté particulière. Il peut arriver en réunion que je sois la seule femme parmi une dizaine d’hommes mais je n’ai jamais ressenti la moindre discrimination. J’ai la chance d’évoluer dans un milieu assez ouvert et la culture de l’entreprise favorise cette mixité. »