Chloé, originaire de Briançon, est une grande passionnée de nature et de montagne. Elle pratique entre autres le planeur et ce n’est pas un hasard si, jusqu’à la fin des sa classes préparatoires, elle voulait devenir pilote de ligne. Mais elle a échoué au concours. Il était difficile de conjuguer les cours et la préparation de ce concours particulièrement exigeant. A partir de là elle a élargi ses possibilités. Pour des raisons familiales, elle s’était intéressée très tôt au milieu de l’orthopédie, et c’est tout naturellement qu’elle s’est renseignée. En plus d’être un domaine qui recrute, la mécanique offre des débouchés dans de nombreux secteurs,  ce qui l’a convaincu de tenter l’expérience. Aujourd’hui, elle aime ce qu’elle fait mais ne se ferme aucune porte En effet, elle n’écarte pas le fait d’essayer d’obtenir une équivalence en médecine pour devenir chirurgienne, un métier qu’elle a découvert de l’intérieur, en entrant dans les blocs opératoires dans le cadre de sa fonction d’ingénieure en recherche chez Biomet.

Son Conseil

« J’ai réalisé mon dernier stage d’école d’ingénieure en Nouvelle-Zélande. Je recommande vivement une expérience à l’étranger. »

Son cursus universitaire

   Son intérêt pour l’orthopédie

Elle a rejoint la filière Mécanique avec l’idée de découvrir davantage l’orthopédie tout en ne se coupant pas d’autres secteurs d’activités.

Des stages déterminants
« Ma mère a eu des soucis de santé et la question s’est alors posée de lui mettre une prothèse ou pas. Je me suis donc intéressée jeune au domaine de l’orthopédie. »  C’est alors tout naturellement qu’elle s’est ensuite tournée vers le domaine de la mécanique : « Je m’étais renseignée, c’est un secteur très porteur avec des débouchées, ce qui a fini de me convaincre. » Elle avait dès le début une attirance pour la biomécanique. « Les enseignements d’anatomie me passionnaient. »

Afin d’être sûre de son choix, Chloé a multiplié les stages dans des secteurs d’activités très variés. Après un stage à l’armée en tant que mécanicienne aéronautique sur les hélicoptères, elle a ensuite réalisé un stage dans le BTP pendant 6 mois en Nouvelle-Zélande. Une expérience très enrichissante. Enfin, elle a également fait un stage en orthopédie à l’hôpital de la Croix Rousse en collaboration avec l’INRETS à Lyon. Elle s’intéressait alors à l’aptitude et à la reprise de la conduite routière des patients qui ont été opérés pour des prothèses de genoux, à l’aide d’un petit simulateur de conduite : tests des réflexes, de la capacité à maintenir une vitesse, etc. « J’étais en relation avec des chirurgiens, j’ai même pu entrer une fois dans un bloc opératoire pour assister à une opération du genou.

Cela a fini d’appuyer mon choix et de confirmer mon intérêt pour l’orthopédie. » Toutes ces expériences lui ont permis d’avoir une vision large de la mécanique et de découvrir de façon concrète les différents secteurs concernés. « J’ai finalement fait le choix de l’orthopédie pour la partie conception. Les autres secteurs m’ont intéressée mais je craignais d’être beaucoup dans les bureaux avec un statut d’ingénieure. »

    La mixité durant ses études

En école d’ingénieur mécanique, dans sa promotion, elles étaient 2 filles pour 21 élèves.

Les filles sont rares dans la mécanique
« De façon générale, en mécanique, il faut s’attendre à être entourée d’hommes. Les préjugés ont la dent dure et peu de personnes saisissent la diversité de ce domaine qui ne se cantonne pas à avoir les doigts dans le cambouis, d’autant plus à un poste d’ingénieur.e. » Les mentalités tendent à évoluer et la Biomécanique attire tout de même un certain nombre de filles.En effet, en master MEGA, la mixité était davantage représentée qu’avant le choix de sa spécialisation.

Ses premières expériences professionnelles

Avant même sa soutenance de mémoire de fin d’études validant son master, Chloé avait trouvé du travail.

Candidatures en ligne
« J’avais commencé à répondre à un certain nombre d’annonces sur le site de l’APEC, (spécialisé dans les offres pour les cadres), et envoyé des CV. » Peu de temps après ses démarches de recherche d’emploi, Cholé a été embauchée, dans une petite entreprise qui acceptait les débutants. Au poste d’ingénieure R&D, elle avait alors pour mission de réfléchir à la conception d’implants pour la colonne vertébrale. « Par exemple il s’agissait de trouver des vis  efficaces pour redresser les scolioses ou encore des cages intervertébrales pour régler des problèmes de disque. » A peine deux mois plus tard, elle avait retrouvé du travail, toujours au poste d’ingénieure R&D mais cette fois-ci pour un groupe, Biomet : « J’ai là aussi trouvé l’annonce sur internet. »

Un métier de responsabilités

Spécialisé dans les implants de la hanche.

Un poste interactif
« C’est très intéressant de voir évoluer un produit jusqu’à sa conception finale. On part d’un cahier des charges, on recherche les meilleures solutions pour arriver à un résultat concret et, qui plus est, utile puisque ces prothèses sont ensuite utilisées au service des patients. » Elle travaille avec différents services : le service Méthodes pour l’industrialisation, le service qualité pour vérifier la conformité de la tige et des autres éléments, le service Procédés spéciaux qui réalisent les packagings conformes (pendant 5 ans le produit doit rester stérile et pouvoir être utilisé en chirurgie) ou encore le service Stérilisation.

Son métier d’ingénieure recherche en développement

Sa vision

Les aspects les plus plaisants du métier :

  • le côté relationnel avec les chirurgiens,  essentiellement lors de lancement de projets
  • les interactions avec les différents services pour que le produit soit mené à terme
  • la phase particulièrement de modélisation et conception : imaginer la meilleure solution pour les patients avec le sentiment d’être utile
  • penser à toutes facettes de notre produit pour répondre au mieux aux besoins de chaque chirurgien et donc du patient.

Les aspects les plus négatifs :

  • la partie documentaire qui intervient en amont, lors du lancement de produit : recherche bibliographique
  • des délais  relativement courts à tenir et la difficulté de coordonner tous les services et de les faire travailler ensemble afin d’atteindre l’objectif final, à savoir la commercialisation du produit.

Zoom sur ses missions

Identification du besoin
Avant toute chose, elle commence par évaluer les besoins du chirurgien (ou d’un groupe de chirurgiens) sur la conception d’un produit, autrement dit le choix de l’implant, de la prothèse et même de l’instrumentation pour poser la prothèse lors de l’intervention chirurgicale. Elle constitue, en collaboration étroite avec le chirurgien, le cahier des charges. D’ailleurs, il lui arrive d’entrer au bloc pour peaufiner son travail, mieux saisir les contraintes, les difficultés et les enjeux et ainsi proposer les produits les plus adaptés aux attentes de ses clients.

Une fois le besoin identifié, elle modélise alors la demande en 3D, à l’aide d’un logiciel de Conception Assistée par Ordinateur (CAO). Puis, elle passe à la phase suivante, celle de la réalisation des plans et des schémas indiquant toutes les cotations pour pouvoir fabriquer les produits et contrôler la conformité de chacun des éléments. Ces cotations seront un précieux indicateur lors de l’usinage. Elle peut faire aussi des prototypes qui seront directement testés par les chirurgiens : « Ils nous font ensuite un retour ce qui nous permet d’avancer à grands pas et de procéder aux modifications nécessaires, par exemple pour allonger ou davantage courber une pièce du produit. »

Conception des pièces
Lors de la fabrication de la pièce, elle n’intervient pas lors de la conception à proprement parler (c’est le service méthode qui s’occupe de l’industrialisation) mais  elle s’assure que tout se passe bien, que la pièce soit conforme au niveau des normes mais aussi de la résistance. Pour ce faire, elle récupère les préséries et réalise des essais mécaniques : « Les modifications apportées nous prennent beaucoup de temps afin de corriger les défauts.»
Suivi de la fabrication et mise en vente
Une fois les tests réalisés et les éventuelles corrections réalisés réalisées, elle constitue les éléments du dossier de façon à ce que le produit soit mis sur le marché : « On doit tout justifier : la conception, le développement, l’industrialisation, et mettre en avant le fait que les normes, très strictes, sont respectées. C’est un gage de qualité pour les clients. »

Son environnement professionnel

    La structure

Travailler pour un groupe offre a ses yeux davantage de perspectives d’évolution de carrière.

Des opportunités professionnelles
Le groupe compte 7000 salariés dans le monde, dont 300 sur le site de Valence où elle travaille (en conception et en production). Elle évolue sous l’autorité directe de son chef de projet, au même niveau qu’un autre collègue, dessinateur 3D. Une fois les grandes lignes fixées, son chef lui laisse la possibilité d’apporter des évolutions au projet comme bon lui semble, à condition qu’elles soient en faveur du client. C’est elle qui finalise les dossiers même si son responsable a bien entendu la possibilité de vérifier son travail. « Travailler dans une grosse entreprise permet de multiplier les opportunités professionnelles. Après quelques années d’expérience dans l’orthopédique, je pourrais progressivement prétendre à un poste de chef de projet. »

    Ses relations professionnelles

Du fait de la transversalité de son poste, elle est en contact avec différents services au sein de son entreprise.

Une grande diversité
Elle suit toutes les étapes de la production, nettoyage, stérilisation, etc. Elle est en lien aussi bien avec d’autres ingénieurs, des dessinateurs industriels ou encore des ouvriers à l’usinage. Elle est également en relation directe avec ses clients qui sont des professionnel.le.s expérimentés de la santé qu’elle suit parfois dans leur milieu, autrement dit dans un bloc opératoire. La dimension interactive offerte par sa fonction actuelle et la diversité de ses interlocuteurs sont pour elle une vraie richesse.

     La mécanique, un domaine encore très masculin

A l’image des formations études en mécanique, elle travaille aujourd’hui dans un univers plutôt masculin.

La biomécanique, un secteur à part
Parmi les ingénieur.e.s en mécanique, les femmes sont clairement en minorité même si une nouvelle recrue vient de faire son arrivée dans l’entreprise, et cela peut s’étendre à l’ingénierie de façon plus générale. Dans son entreprise, c’est le cas également en dessin industriel, en bureau d’études ou encore au service méthodes. En revanche, en qualité et en validation, les équipes sont nettement plus mixtes. « L’intégration se joue beaucoup sur la personnalité et l’expérience. Le domaine de l’industrie marche essentiellement à la compétence de la personne. Les femmes sont plutôt bien accueillies dans les services et auprès des clients. Je travaille avec un bureau d’études qui vient de recruter la première femme depuis dix ans. » En tant qu’ingénieure mécanique, elle est en relation avec différents corps de métiers et différents services au sein de son entreprise donc elle ressent nettement moins cette réalité.